« Révélation au désert numérique » a été écrit après mon passage au festival Désert Numérique à Saint-Nazaire le Désert en juillet 2011.
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« Ils arrivèrent au désert de Sinaï, et ils campèrent dans le désert »
Exode, 19, 2.
Il arrive souvent, chez les professionnels de l’art numérique, que l’on débatte pendant des heures sur l’art numérique, sur sa définition, sur son histoire, sur son avenir, sur sa capacité à toucher un large public – la question en l’occurrence ne se pose que lorsqu’il ne se confond pas avec le divertissement fabriquées par les industries culturelles – … et d’abord et avant tout s’il existe en tant que tel. Ce genre de question met en jeu de telles antinomies théologico-politiques que le mieux que l’on ait à faire dans ces cas-là est d’invoquer dieu ou les dieux lorsqu’on est croyant ou de suspendre son jugement en attendant des jours meilleurs lorsqu’on ne l’est pas. Certains diront que les deux options ne sont pas incompatibles puisque c’est finalement ce que firent bon nombre de prophètes lorsqu’ils firent retraite au désert.
Me rendant donc au désert (numérique), un festival organisée par Karen et Marika Dermineur, dans un paysage somptueux et montagneux, j’eus – et je ne fus pas le seul – la joie d’assister à un moment merveilleux.
Ce vendredi sonnait pour les enfants du village la fin de l’année, sans doute le dernier jour avant les vacances. Et comme souvent dans ce cas, les enseignants organisent une fête ou un concert. Concert et fête il y eut. Dans une église pleine à craquer, sous le regard d’un Christ en croix, de leur enseignante, Alice Dubief, et de l’artiste (numérique) Yann Leguay, les enfants de l’école primaire de Saint-Nazaire le Désert offrirent un étonnant concert électro-acoustique alliant musique concrète et musique sinusoïdale (1). Tandis que s’égrenaient les sons et les rythmes tirés de leurs objets sonores (des pierres augmentées de capteurs et autres instruments improbables, fabriqués pour l’occasion et consacrés à une Electricité quasi-divinisée – McLuhan n’était pas loin), la lumière apparut soudain. Ces enfants ignoraient tout de nos débats. Ils éprouvaient du plaisir en se livrant à l’activité artistique et ils nous le communiquaient. Alors, numérique ou pas numérique ? Ils s’en foutaient pas mal et nous aussi. Merci à eux et aux soeurs Dermineur.
Le festival continue jusqu’au 3 juillet 2011. Expo, conférences, ateliers …
[1] Merci à Sébastien Zaegel pour cette dernière précision.